Mardi 22 mars
A 4h du matin, je suis réveillée. Aucune raison particulière, j’aime me lever très tôt. Magali aussi est réveillée et m’a envoyée un message : il y a eu 3 explosions à Bruxelles. J’ai mal au ventre et envie de vomir. Je revis d’un coup les attentats de Paris : je prie pour que rien ne soit arrivé aux gens que j’aime, mes amis, mes collègues, leurs familles. Je pleure. Je me sens impuissante.
Grâce à Facebook, j’apprends rapidement que la plupart de mes amis sont « en sécurité ». Liza et ses 4 enfants étaient à l’aéroport, au niveau des départs quand les 2 explosions ont eu lieu, ils n’ont pas été blessés mais sont sous le choc.
D’autres n’ont pas eu autant de chance et lire leurs témoignages ou ceux de leurs proches me bouleverse. Ce qui me touche le plus, c’est que la plupart sont des messages d’amour et de paix.
J’écris ce récit plus de 3 semaines après les évènements. Je ne suis pas arrivée à écrire avant, ni sur les attentats, ni sur mon périple. Mon voyage et mes histoires me semblaient futiles. J’ai beaucoup réfléchi. J’ai oscillé ces dernières semaines entre l’espoir et des angoisses comme j’en ai rarement ressenti. L’espoir car je sens au fond de moi que l’amour, la pleine conscience et l’écoute sont la réponse au climat de violence et de peur dans lequel nous vivons. L’angoisse quand je m’auto-apitoie sur moi même : je ne suis pas assez forte, pas assez intelligente, pas assez courageuse… pas assez. Juste pas à la hauteur de mes idéaux.
Heureusement, mes amis, la méditation et mes lectures sont là pour me faire prendre du recul. J’ai des envies de changer le monde (qui n’en a pas ?), pharamineux comme projet mais par où commencer ?
La première photo d’en tête de mon blog, au début de mon voyage, reprenait une citation de Lao-Tseu: « Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas ». Changer le monde commence par un premier pas. Pour moi ce sera sourire. Sourire à tout le monde, dans la rue, au supermarché, dans les transports, sourire le plus souvent possible, même quand je n’en ai pas envie. Me sourire à moi aussi quand je n’ai pas le moral (pour moi, le sourire le moins évident).
Le sourire est une arme très puissante, même un sourire forcé est mieux que pas de sourire du tout.
Depuis que je le pratique, les gens dans la rue me le rendent souvent (bon, en Équateur , les gens sourient beaucoup !). Des gens, que je ne connais pas, s’arrêtent pour me parler. Le sourire est comme un virus, il passe rapidement d’une personne à l’autre. Le sourire d’un inconnu peut changer le cours de notre journée, c’est un rayon de soleil dans une journée autrement assez grise. En plus c’est une arme à double tranchant, car plus je souris et plus je me sens bien.
Bon, je laisse un poète en parler mieux que moi et je retourne écrire mon blog car même le futile a finalement sa place ici, surtout si je peux vous faire sourire.
Un sourire.
Recueil : Le Livre d’amour (1920)
Un sourire ne coûte rien et produit beaucoup,
Il enrichit celui qui le reçoit sans appauvrir celui qui le donne,
Il ne dure qu’un instant, mais son souvenir est parfois éternel,
Personne n’est assez riche pour s’en passer,
Personne n’est assez pauvre pour ne pas le mériter,
Il crée le bonheur au foyer, soutient les affaires,
Il est le signe sensible de l’amitié,
Un sourire donne du repos à l’être fatigué,
Donne du courage au plus découragé
Il ne peut ni s’acheter, ni se prêter, ni se voler,
Car c’est une chose qui n’a de valeur qu’à partir du moment où il se donne.
Et si toutefois, vous rencontrez quelqu’un qui ne sait plus sourire,
Soyez généreux donnez-lui le vôtre,
Car nul n’a autant besoin d’un sourire
Que celui qui ne peut en donner aux autres.
Raoul Follereau
(1903-1977)